• Dix ans déjà. Le SIDA tue toujours.


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  • La saison 3 du Dr Kpote reprend en exclu sur ce blog dès la semaine prochaine, mon producteur m'ayant signifié qu'il reconduisait mon contrat. Il y a des séries, qui au fil des saisons perdent de l'intérêt. Ainsi, je me souviens de mon engouement pour "Lost" et de ma désillusion lors de la troisième saison. A 400 passages/jour en moyenne sur ce blog, je suis aux antipodes des blockbusters américains mais j'espère quand même offrir aux lecteurs qui échouent ici, un témoignage digne de leur intérêt. Voilà pour la promesse commerciale.

    A l'aube de ce nouveau départ, le sac de capotes déjà en bandoulière, je me pose la rituelle question de l'envie. Ce boulot, on ne le fait pas pour le fric. Seuls les travailleurs sociaux entrant en politique comme on passe à l'ennemi, peuvent espérer un jour, être assujettis à l'ISF.

    La motivation sera-t-elle intacte après 7 années de salive préventive disséminée dans toute l'Ile-de-France, de branlettes sous latex, de queues mal lubrifiées dans des cantines surchargées, de moments de plaisir partagé aussi courts qu'un SMS, de transports trop longs pour être bons ?… Il me semble qu'il y a un semblant de réponse dans la question…

    J'ai fini la saison dernière dans le dur, le moral usé par les témoignages de violences sexuelles, les propos homophobes ou les raccourcis religieux. Mais les vacances m'ont ressourcé pour la simple et bonne raison que j'ai tout fait pour éviter les distributeurs de préservatifs, les planning familiaux, les lieux de culte, les coins à putes et les meetings de droite, les escadrilles de chlamydiae (à ne pas confondre avec le Rafale, plus aquatique dans son mode de locomotion). J'ai aussi banni de mon itinéraire estival les nids de jeunes, leur préférant le quadra bedonnant, entouré d'une progéniture plus encline à jouer aux pâtés de sable qu'au docteur.

    Aussi, si en terme de militantisme social, ça fait bien longtemps que j'ai perdu ma virginité, c'est avec une motivation aussi finement recousue qu'un hymen perdu, que je repars débattre, informer, prévenir, écouter.

    Les nouvelles du front sont mitigées : on a un début de semblant d'espoir concernant un vaccin contre le VIH, la future contraception d'urgence sera disponible uniquement sur ordonnance à un prix prohibitif, les fous de Dieu se reproduisent comme un nuage de sauterelles sur l'Egypte des pharaons, Sarko 1er est toujours vivant et mon banquier, après s'être renfloué sur mes impôts, m'a sucré pour me remercier, 85 euros d'agios.

    De plus, je me demande si le masque de catcheur est suffisant pour éviter toute contagion à la grippe H1N1.

    Bienvenue sur le "tout-à-l'égout de la démocratie", comme l'a dit si connement Denis Olivennes, patron du Nouvel Obs.


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  • EllaOne, la "pilule du surlendemain", sera présentée en exclusivité mondiale lors du 8e Congrès européen de la société de gynécologie à Rome, du 10 au 13 septembre 2009. Efficace jusqu'à 5 jours (durée de vie des spermatozoïdes) après la prise de risques, elle devrait rapidement rendre caduque son ancêtre le Norlevo, à l'efficacité limitée à seulement 3 jours.

    Il est prévu qu'elle soit disponible uniquement sur ordonnance, histoire de brosser dans le sens du crucifix les conservateurs de tout bord et montrer que les épiciers de la morale restent ferme face à la chienlit post-Woodstock qui copule et avorte à tout va, mais parions que nous saurons monter au créneau en temps voulu pour faire changer cette décision absurde.

    Non. Ce qui me dérange le plus, c'est que les médias la vendent déjà sous l'étiquette accrocheuse de "pilule du surlendemain"… Déjà qu'on se battait contre le terme de "pilule du lendemain"… J'imagine très bien les lycéennes décompter sur leurs petits doigts atrophiés par les touches de leur mp3-portable-myspace-fessebook, les fameux deux jours après le rapport, avant de se rendre au planning. Pourquoi ne pas parler simplement de contraception d'urgence? Je pense que c'est suffisamment clair même si ça titre moins bien sur Google.

    "La pilule du lendemain", ça ne voulait déjà rien dire. Pourquoi attendre le lendemain matin pour réagir, quand on a fait l'amour au réveil, sans préservatifs et moyen de contraception, hein ? Tout ça relevait déjà d'un conformisme absolu qui sous-tendait qu'on ne pouvait faire l'amour que le soir. Et le petit coup du matin, dans le bus scolaire ou les chiots du lycée, on n'en fait quoi ?

    Que celle qui n'a jamais connu le frémissement du clito au chant du coq, ou celui qui n'a jamais vécu, un rien ému, le double lever de la trique et du soleil me jette le premier pilulier.

    Alors, coït du matin, chagrin ?


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  • Sidaction télégénique, capotes hérétiques et déclarations canoniques, le sida refait la une. Trente ans d’épidémie et d’information n’ont pas suffi à avoir la peau de certaines représentations. Petit florilège drainé au fil de séances de prévention qui prouve qu’il n’y a pas que le pape qui dit des conneries.

    Le sida est toujours un facteur de discrimination. Les séropositifs, dès lors que leur statut sérologique est révélé, rencontre des difficultés professionnelles, administratives et relationnelles… Mais plus vicelard, le sida sert aussi d’alibi pour stigmatiser un peu plus tous ceux qui incarnent la différence. Les « déviants » infectés sont devenus l’exutoire idéal pour les intégristes de tout bord.
    À qui la faute ? Dans l’histoire du sida, la question de l’origine de la contamination est un grand classique. Il faut un coupable. Donc une victime qui a subi la contamination comme une agression. C’est un mécanisme de défense très utilisé, pour éviter d’être celui ou celle qui l’a bien cherché.

    Du coup, beaucoup de jeunes Africains revendiquent la thèse du virus inoculé sciemment par les blancs, qui souhaitent s’octroyer les richesses du continent et se débarrasser des noirs.
    Le virus du sida a franchi la barrière des espèces et réussi sa mutation en passant du singe à l’homme. Acte zoophile et preuve ultime de la décadence humaine, nombreux sont ceux qui pensent que l’origine de ce passage est anale. Pratique, puisque ça permet aussi d’égratigner, sous l’étiquette sodomite, les homos pour les hétéros, les noirs insatiables pour les blancs coincés de la fesse et les fausses vierges déniaisées par derrière pour les barbus du cul… Du coup, la théorie du singe à l’anus étoilé, demeure largement véhiculée.
    À l’annonce de la séropositivité, le couple implose, chacun renvoyant l’autre à sa culpabilité, à son infidélité. Mais en général, on en profite aussi pour faire le solde de tout compte.
    Côté réacs, l’étranger est souvent le vecteur de transmission et les jouisseurs multi partenaires subissent l’opprobre des missionnaires au foyer fixe…

    Depuis quelque temps, je rencontre un vrai retour du concept de punition divine autour des personnes infectées. Les voies du seigneur étant impénétrables, seuls les mécréants nymphomanes peuvent être punis. La muqueuse du gland étant plus épaisse chez les circoncis, les risques de transmission sont plus faibles. À la diffusion de l’information, beaucoup d’entre eux ont traduit qu’ils pouvaient enfin sortir à découvert et les VRP de l’au-delà s’en sont servi pour faire la chasse au prépuce. Les différents papes en ont fait leur fond de commerce pour vendre de l’abstinence et je me souviens d’une église évangéliste qui faisait monter sur scène des miraculés ayant soit disant réussit une séroconversion grâce à la lumière divine… "Le seigneur est mon berger" et le sida, un chien qui sert à rabattre les agneaux en perdition.

    La fameuse paranoïa de la seringue infectée sous les sièges du RER ou du cinéma est déjà une légende urbaine. Cette rumeur invite à la discrimination des toxicos, puisque la seringue infectée aurait été installée par ce salaud de drogué qui veut se venger de la société…Combien de quartier ont été nettoyés en aiguillonnant la peur ancestrale de la seringue volontairement jetée pour infecter les pauvres petits enfants innocents. À la RdR (réduction des risques), beaucoup préfèrent la EdT (l’élimination des toxs).

    Si on rajoute à cette longue liste de parias, les détenus qui s’enculent en cellule, les prostitué(e)s et le pauvre moustique, bien incapable de contaminer qui que ce soit, on finit par comprendre que le sida a une utilité pour les parangons de la morale et tous ceux qui gagnent leur croûte sur la chasse aux nuisibles. C’est à se demander si certains ne rêvent pas de voir le virus obtenir le label "d’utilité publique".
    Le slogan d’Act-Up "Sida, on meurt. L’indifférence demeure." n’est plus d’actualité. Il conviendrait de scander "Sida, on meurt. Certains en font leur beurre."


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  • Hier, mon employeur m’a missionné dans le VIIIe arrondissement de Paris, dans un lycée privé sous contrat. Je suis donc devenu un des rares Français à profiter d’une vraie promotion sociale sous forme de délocalisation !
    C’est propre le VIIIe … Et cossu, surtout. Pas un scooter trafiqué, une poubelle à moitié fondue, des mégots de bédos abandonnés… Devant le lycée, accrochées aux barrières, une cinquantaine de trottinettes attendent patiemment la sortie des élèves. La vision est surréaliste. Devant mon regard amusé, un cravaté aux cheveux blancs descendant de son 4x4 version XL, m’apostrophe, en surlignant sa phrase d’un clin d’œil pubeux en villégiature au Club  : « c’est génial, non ? » avec ce petit accent qu’on doit entendre dans le dernier virage en stem, à la fin d’une piste rouge bien négociée, à Megève…

    J’attends l’intercours pour rejoindre la classe dans laquelle, je dois intervenir. Quelques affiches de promo pour le scoutisme côtoient une vierge qui berce l’enfant Jésus, qu’elle a pondu par l’opération du Saint-Esprit-Qui-Devait-Quand-Même-Avoir-Un-Gland. Et puis les élèves arrivent bruyamment. Comme partout.

    Pourtant quelque chose me met mal à l’aise et j’ai du mal à déterminer quoi. Ils sont joyeux, courtois entre eux, polis vis-à-vis de ma personne, ne se bousculent pas… Je viens d’être téléporté dans le meilleur des mondes et plutôt que de me réjouir, j’éprouve comme un malaise. Je ressens une tension, comme un début d’ulcère larvé sous le gras du bide. Puis, d’un coup, le "pourquoi du comment" illumine mon cerveau : tous ces ados sont blancs. De type européen comme on dit aux States.

    En Seine-Saint-Denis, on n’a pas l’habitude de baigner dans une atmosphère monochrome. L’immersion est totale et le choc, brutal. D'un coup, mon cerveau ne dispose plus de ce fameux nuancier des pigmentations de peau, symbole du grand mix international, miroir du vrai monde avec ses vrais gens. La foule de gosses est désespérément blanche. J’ai un peu le tournis. Je n’ai plus l’habitude. On devrait créer des sas de décompression aux portes de Paris pour ceux qui arrivent du nord. Le passage trop rapide d’un département métissé à une zone plane et blanche comme l’Arctique a un effet dévastateur sur l’équilibre psychologique. La pâleur des visages m’agresse la rétine. Brutalement, ma dépendance au mélange se fait invalidante et j’éprouve un manque. Dans la classe, il m’a bien fallu un bon quart d’heure avant de m’habituer au milieu ambiant, de respirer normalement dans cette atmosphère plus aseptisée.

    Dans ce magnifique décor Haussmannien, je m’imagine au cœur des vestiges du passé, au milieu des ruines d’une France hermétique aux autres continents. Je tâte mes poches, persuadé qu’on va me demander de payer mon café en francs. Saurais-je leur parler, moi qui viens de l’étranger, de l’autre côté du périphérique?

    Le sujet, c’était les produits psycho actifs. Dans mes petits papiers, j’ai trouvé plein de questions d’ados altruistes qui voulaient aider leur prochain, un peu trop toxico. Sont sympas les p’tits blancs friqués qui voient du GHB dans tous les verres… Mais c’est difficile d’imaginer les bas-fonds du haut de sa tour de Babel. Je me demande si je vais les croiser cette après-midi entre Répu et Nation, la canette à la main et le bédo aux lèvres, au milieu de tous ces noirs sans-papiers qui viennent du 93.

    Allez, viens, fils de MEDEF, on t’attend…


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