• Droite dans les bottes. Bancale dans les capotes.

    Le RER me dégueule avec la horde d'esclaves du pouvoir d'achat, aux yeux boursouflés par le sommeil, qui m'accompagnent dans une banlieue du sud de Paris, cossue, propre et sicavée des caves aux greniers... Pas une cloche dans la rue piétonne, pas un attroupement de jeunes devant les établissements scolaires, pas un chewing-gum qui ferait de la résistance, accroché aux pavés... Les mecs marchent vite, le portable vissé à l'oreille. Les femmes roulent doucement entre dépose-chiards et shopping matinal. Tout baigne. J'ai RDV pour une formation d'adultes que je co-anime sur le thème du «comment parler sexualité aux ados ?», un bon fourre-tout d'outils et de pratiques pour faire le tour du caleçon et du string de ces futurs adultes qui nous inquiètent tant.

    Le groupe est composé de parents d'élèves, exclusivement des femmes, qui ont décidé d'investir le lycée de leur progéniture pour y installer une structure d'écoute... Pourquoi pas ?  Le projet est largement soutenu par le maire UMP de la ville, qui voit dans cet engagement familial, l'assurance que la morale sera sauve. C'est vrai, on imagine difficilement des parents d'élèves choisis sur des critères plutôt conservateurs, témoigner de leurs diverses expériences de fumette, défendre le droit à l'avortement et inviter Act-Up à un zap pour répondre à des actes homophobes. Histoire de les instrumentaliser un peu plus, il nous a même envoyé sa première adjointe pour nous faire la retape en introduction de la formation... Sortez les violons.
    La "De Panafieu" locale tente d'abord de nous flatter l'ego en vantant les qualités internationales de notre savoir... Ni plus, ni moins ! Au passage, elle nous projette le diaporama de ses voyages cinq étoiles, tout en soulignant son profond désir de développer la prévention du sida au Chili, en Afrique du sud et même au Burundi (ne soyons pas radins). Les séropos de ces pays seront donc ravis d'apprendre qu'enfin, ils vont pouvoir découvrir ce qu'est une capote...

    Et puis, elle se tourne vers sa bande de missionnaires patronnesses et les remercient de leur sens du devoir, de leur engagement (qui ne coûtera pas une thune à la mairie), et de cet exemple magnifique de solidarité qu'elles donnent aux autres concitoyens. Pourquoi aller chercher des travailleurs sociaux, parfois un rien gaucho, quand on peut faire le boulot nous-mêmes, entre gens de bien, hein, je vous le demande ?

    «Sur ce, je vous laisse travailler et je vais visiter nos crèches, qui sont d'un cââlme, mesdââmes, qui prouve bien la quââlité de vie dans notre petite ville». On n'est pas chez les sauvages, ici.

    Ben voilà, on s'est regardé. On avait 3 jours pour apporter une réflexion sur les pratiques d'un groupe de bénévoles, femmes au foyer, qui avait répondu à un appel municipal comme on irait au patronage, qui se préparait à recueillir la parole des ados sans cadre, sans réflexions, sans le soutien du proviseur et l'infirmière scolaire, sans expérience, et des connaissances sur la sexualité et les conduites addictives limitées à ce que leur laissait entrevoir leurs propres ados et google... Quand je vois les problématiques soulevées à chacune de nos interventions, je me dis que les élus sont non seulement irresponsables mais aussi de vrais assassins. Je ne remets pas en cause l'implication de ses femmes et la belle énergie dont elles font preuve mais je doute fort que l'adjointe au maire soit aussi dithyrambique à leur sujet en cas de dérapage... Un gros raté avec un ado sur le thème de la sexualité dans un lycée, ça peut vous valoir la une du Parisien et vous faire perdre une élection, ça...


  • Commentaires

    1
    çateregardepas
    Mercredi 16 Avril 2008 à 16:25
    je parie sur Neuilly
    ou saint-cloud. C'est ça?
    2
    Mercredi 16 Avril 2008 à 16:30
    Raté çateregardepas,
    mais c'est bien dans le 92… et nulle part ailleurs.
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