• Depuis quelque temps, nous sommes face à une urgence sanitaire sans précédent : les détracteurs de l’éducation affective et sexuelle à l’école prolifèrent plus vite qu’une joyeuse bande de chlamydiae dans le jacuzzi d’un spa ! Sur la Toile comme sur le bitume, ils bonimentent pour fourguer leur conservatisme mal lubrifié du siècle dernier et, pour diaboliser nos actions de prévention, ils ne sont pas avares d’inepties. Le Free Speech Bus du collectif chrétien Citizen Go sillonne l’Île-de-France pour répéter à l’envi que « l’Éducation nationale se rend coupable de déconstruction et de déstabilisation d’un public fragile » tout en réclamant « la suppression de la théorie du genre à l’école ». Leur vieille copine Farida Belghoul, initiatrice de la « journée du retrait de l’école », où elle éjaculait son fiel à l’extérieur des bahuts, plussoie en jouant les fossoyeuses de trans : « On peut modifier le déguisement, mais pas la biologie, la spiritualité. Il est faux qu’on puisse changer de sexe. Toutes les tentatives qui vont dans ce sens ne peuvent conduire qu’à la mort ! »
    Le Pr Joyeux, surfant sur la vague d’émotion que suscitent les onze vaccins obligatoires, en profite pour cracher, lui aussi, sa bile sur l’éducation sexuelle à l’école, faisant de nous – rien que ça – des initiateurs de futurs pédophiles : « Va-t-on permettre de parler de masturbation infantile précoce à des enfants de maternelle, de décrire des positions de pénétration vaginale à des collégiens […], de leur expliquer comment se pratique la sodomie et pourquoi les acteurs de films pornographiques éjaculent hors du vagin de leur partenaire ? […] Cela ne peut qu’augmenter les cas de pédophilies et d’incestes. » L’initiative « Les professionnels contre l’éducation sexuelle et les droits sexuels » de Maurice Berger, pédopsychiatre momifié qui ne sait pas que ses petits-enfants kiffent Tchoin * sur leurs tablettes, exige qu’on arrête de parler de la « théorie du genre » et souhaite « limiter l’information sur la sexualité à la prévention des risques, sur la base de données scientifiques ». Que vous soyez les ventriloques de la parole de Dieu, de Freud ou d’Hippocrate, vous n’êtes que de vulgaires manipulateurs au service de l’obscurantisme, rêvant de chasser tout ce qui n’est pas hétéro et cisgenre de vos existences consanguines.
    Non, nous n’organisons pas des exercices de masturbation collective, ni n’invitons les jeunes à rentrer dans un protocole hormonal pour changer de genre. Par contre, quand ils nous questionnent, nous leur répondons sans tabou. « Knowledge is a weapon » (« La connaissance est une arme »), scandaient les militants d’Act Up face à la rétention d’infos des labos et des médecins. Si les culs-bénits veulent maintenir les nouvelles générations dans l’ignorance, c’est pour les garder bien au chaud sous leur emprise sexiste, homophobe et patriarcale. On ne change pas un monde qui merde, hein ?
    Le chœur de mes animations dépasse de très loin le cadre de la sexualité en s’inscrivant dans celui de la « relation à l’autre » avec la pluralité des sentiments qui nous traversent. Je respecte le vécu et le rythme de chacun-e, qu’ils-elles se disent dans une sexualité active ou ne l’envisagent pas avant le mariage, qu’ils-elles aient roulé des pelles à leur partenaire ou se soient juste entraîné-e-s avec l’oreiller.
    Vous n’avez pas chômé, ces dernières années, et la morale pour les nuls, vous l’avez vicieusement glissée dans le cartable des écoliers. Alors, forcément, on doit batailler pour accompagner les jeunes dans la déconstruction des clichés et leur offrir un bon bol de liberté et d’égalité. Aussi, quand j’écris le mot « CHOIX » en lettres capitales au tableau, c’est toujours émouvant de voir les épaules se relâcher. Bien avant de parler de sexualité, je les encourage à identifier les stéréotypes de genre et les normes sociétales qui influencent fortement notre construction et notre vie affective. Ça doit être cela que vous nommez la « théorie du genre » et qui cristallise toute votre haine. Nous osons sortir de la binarité hommes-femmes, de l’hétéro­normativité, et ça bouscule pas mal de professionnels qui n’ont pas dépoussiéré leurs représentations depuis un bail.
    Dans sa vidéo, Maurice Berger fustige « ce programme qui introduit la théorie du genre » et qui représente « une attaque des processus d’affiliation, car l’enfant pourrait en quelque sorte choisir à quel sexe il souhaite appartenir ». Pour asseoir votre société aseptisée, vous extrapolez totalement sur notre action. Votre fumeuse « théorie du genre », épouvantail agité pour que la graine du papa LMPT (La Manif pour tous) germe bien dans le ventre de la maman LMPT, n’existe pas. Dans nos animations, on n’invite pas l’enfant à choisir son sexe, mais on verbalise l’étendue des possibles, au-delà de son sexe d’assignation. On donne une visibilité aux trans, aux neutres, aux fluides, à tous ceux qui ne se retrouvent pas dans vos cases bien normées. Mais pour rendre vos nuits moins blanches, je vous assure qu’avec nous les jeunes ont aussi le droit d’être hétéros.
    Vous souhaitez « limiter l’information sur la sexualité à la prévention des risques, sur la base de données scientifiques ». Pourtant, cette prévention hygiéniste a montré ses limites face à la pandémie du sida. La prise de risques est subordonnée à de nombreux facteurs comme l’état de la relation, le rapport dominant-dominé, le consentement, la négociation des moyens de protection, la prise de produit psychoactifs, le respect et l’attention qu’on porte à son partenaire, l’estime de soi, la connaissance et l’acceptation de son corps, le vécu, l’environnement, etc. Balancer des capotes en énumérant des risques et des données scientifiques n’a aucun sens. La vulnérabilité des uns et des autres au moment du passage à l’acte se joue bien en amont.
    Vos observations nient totalement l’émergence d’une nouvelle culture des relations orchestrée par cette véritable révolution numérique que sont les réseaux sociaux et l’accès à Internet aux très jeunes. Nous n’invitons pas à la sexualité, nous ne faisons qu’accompagner le flux continu de cul gratuit qui inonde déjà leurs vies. « Pourquoi ne pas attendre que les enfants posent des questions sur la sexualité au moment où ils en ressentent le besoin ? » questionne Maurice Berger. Mon gars, tu as un point G de retard sur ton smartphone, car les enfants ne posent plus de questions, ils vont chercher les réponses sur les sites référencés par Google, sur des forums de gamers et auprès de youtubeurs bien plus influents que leurs parents. Alors, plutôt que d’attaquer les programmes de prévention, mobilisez-vous contre ces multinationales du sexe spéculant sur la pornographie, cette industrie du clip qui cultive les stéréotypes, ces talk-shows qui banalisent le sexisme et l’homophobie…
    Je distribue des capotes pour que les ados ne contractent pas le sida, une mauvaise blennorragie ou évitent une grossesse non prévue. Mais tout « initiateur-séducteur » que je suis d’après nos détracteurs, j’ai l’intelligence de les tendre uniquement à ceux qui viennent les chercher, sans pousser à la conso. Libre à chacun-e d’en prendre ou pas.

    Pour conclure, je tenais à vous délivrer un beau message d’espoir qui va vous faire mouiller sous vos robes de bure. Nous sommes une espèce en voie de disparition. On va bientôt nous remplacer par des chatbots, des logiciels programmés pour simuler une conversation en langage naturel. Exit les temps d’échanges humanisés où, face à une révélation de violences sexuelles ou une prise de risques, l’animateur-trice, rompu-e aux techniques de counselling, accompagne les mots, accueille les émotions. Le logiciel, lui, rappellera à vos enfants les procédures à suivre à coups d’empathie préprogrammée. L’outil, sans vécu émotionnel, n’aura que la froideur de sa matrice à partager. Alors cette main qui se posait sur celle de vos gosses, ces mots qui réconfortaient et accompagnaient, ce partage d’expériences qui redonnait de l’espoir, tout ça sera définitivement rangé au rayon vintage de la prévention.


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