• Ça ne vous aura pas échappé : les musulmans fêtent l'Aïd-el-Kébir, le retour de La Mecque. Enfin pour ceux qui en sont revenus… Parce que faire la chenille autour de la Kabaa avec deux millions de copains en chemises de nuit, on peut se prendre les pieds dans le tapis et se faire piétiner. Remarquez, il vaut peut-être mieux se faire marcher dessus, plutôt que de se faire défoncer par les roues des fauteuils, à Lourdes…    

    Du coup, avec cette histoire de grosse teuf internationale sur fond de peau de mouton (le Woodstock de l’orient en somme), ce matin, dans le lycée pro où je devais intervenir, il n’y avait personne ! Non, le jeune ne s’était pas massivement rendu à La Courneuve, où pour l’occasion un abattoir géant avait été inauguré, mais était bel et bien en train de se marrer dans les rues en priant pour que les fêtes durent, durent…

    Je vois déjà le facho qui sommeille sous la touche F3 de son ordi, se frotter les mains et penser tout haut devant son écran : « Je vous l’avais dit. Ce pays est envahi par des hordes de sarrasins prêts à djihader tout ce qui bouge un jour de fête musulmane. Non seulement ils ont déjà mangé le pain des Français mais aussi ils vont nous bouffer notre retraite… » 

    Franchement, si à l’époque où je fréquentais (peu assidûment d’ailleurs) les bancs du collège ou du lycée, on avait fêté l’Aïd, je crois bien que je me serais converti le matin même pour faire sauter ma journée de bahut et aller fumer avec mes potes.

    Après tout, les fêtes religieuses, soit on les chôme toutes, soit on les élimine du calendrier scolaire. C’est quand même sérieusement chrétien de ne fêter officiellement que celles qui concernent les crétins. Moi, je suis plutôt pour éliminer tout ce merdier. Au moins, on fera des économies à Noël et je n’entendrai plus mes voisins égorger l’agneau de Pâques avec un crucifix mal aiguisé…

    Je suis donc reparti me coucher. Ah j’oubliais, ce n’était pas le sida le sujet du jour, mais les drogues… L’opium du peuple, quoi. 


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  • Bon, les banderoles sont pliées à la cave, les autocollants ont laissé des traces rondes ou carrées sur les cuirs de manif, la CFDT est partie faire le tapin au MEDEF et on a tous mal au cul. Comme il faut mettre un peu de margarine dans les épinards, on laborieuse à nouveau et le soir, on décongèle les Morteau (ben ouais, j’aime bien la Morteau) qu’on s’était mis de côté pour les jours sans. Octobre s’est paré de noir, pour mieux porter le deuil de nos illusions, si tenté qu’il nous en restait un chouia…

    Ce matin, dans le RER, je rejoins la cohorte des déportés vers les camps de travail d’un patronat qui a eu la confirmation qu’il pourra nous faire trimer jusqu’à notre dernière boîte de Viagra. Emporté par la foule, je limace, via le RER A, en direction d’Achères dans le Val d’Oise. Achères, c’est beau comme une ville nouvelle en phase de dépucelage au bulldozer, les rues écartées face à la gare routière, sa vulve commerciale offerte aux éjac’ du RER, une cité dortoir qui se vide au petit matin et s’endort le soir…  Je suis à la bourre, donc je ne prends pas le temps de visiter. De toute façon, il pleut.

    J’ai des classes de filles ce matin, des "CAP petite enfance" et des carrières sanitaires et sociales. Dans ce lycée, il n’y a plus d’infirmières. C’est trop mal payé… Et pourtant, les infirmières scolaires ont plus d’utilité qu’un trader : elles font de l’accompagnement affectif et social, elles donnent des cours d’anatomie, elles pansent les plaies du cœur, elles diffusent de l’info, de la capote, de la contraception d’urgence, elles orientent sur le centre de planification, elles signalent, rencontrent, dérangent parfois et au final, arrangent toujours… Elles donnent dans l’humain, pas dans le G20. Et tout ça pour 1300 euros par mois environ. Et oui, sache le, toi le cadre sup. de mes roubignolles : pendant que tu fais suer le prolétariat, ta fille avale du Norlevo au lycée en s’épanchant sur ton absence, tes priorités professionnelles, tout en vomissant ton goût du pognon qui tue tout le reste.

    Les infirmières sont des véritables boites à sondage de l’adolescence, une sorte d’IPSOS du "djeuns" version terrain en continu. Les études sur les ados, ce n’est pas la peine de les commander aux sociologues de télévision : la température de la jeunesse, elles la connaissent par cœur. Mieux, quand la fièvre commence à monter dans les banlieues, elles l’anticipent. Tiens, au passage, je propose que nous dissolvions les CRS pour les remplacer par des Compagnies Républicaines d’Infirmières.

    Les infirmières sont aussi mes anges gardiens dans les lycées. Leur bureau est souvent excentré par soucis de confidentialité. Là, entre deux Doliprane et une serviette hygiénique demandée comme si on dealait de la poudre en face du poulailler, elles me proposent un café, m’accompagne à la cantine (alors que ça fait des années qu’elle ne la fréquente plus), disserte avec moi sur cette jeunesse inquiète que nous côtoyons au quotidien.

    Mais d’infirmière à Achères, il n’y en avait point. Alors, les filles m’ont attendu à la fin de l’animation parce que taper étoile sur un numéro vert, ça ne remplace pas la chaleur humaine, le conseil les yeux dans les yeux. Du coup, j’ai fait des heures sup’. J’ai suppléé au vide social de notre chère République bananière qui se dépense au Fouquet’s. Les filles avaient plein de questions sur les tests de grossesse, la contraception et l’IVG. Certaines n’étaient plus très loin de la correctionnelle et je les ai envoyés illico presto au planning familial pour la prise de sang qui s’imposait… Le sida, ce n'était pas la priorité. On était dans l’angoisse du ventre, les veilles de baffes paternelles qui envoient direct à la case foyer, le dos du mec « qui aurait pu être un papa si craquant » qui s’éloigne…

    N’ayant fait que 3 jours de médecine, je me suis abstenu de poser des diagnostics. En gros, je n’ai pas fait mon doctissimo.fr, les hypocondriaques étant déjà suffisamment nombreuses. J’ai juste rassuré et surtout orienté. Il faut dire qu’on a la grossesse crânienne un rien nerveuse à 15 ou 16 ans. Et de l’inconscient à l’utérus, il n’y a qu’un pas, qu’un spermatozoïde peut franchir la flagelle bandée.

    Elles le savent les filles, qu’à 15 ou 16 ans, elles sont au top de l’hormone, au meilleur de l’ovulation, open à tout ce qui passe et pourtant, elles ont le cupidon collé aux nichons, le bon sentiment qui érode la mémoire, l’amour qui éblouit la prévention. Mais une fois les "oh oui" du soir métamorphosés en "oh non" du matin, il ne reste que les yeux pour pleurer, l’estomac pour se nouer, l’angoisse qui ronge les ongles et la life.

    Elle a 15 ans justement et d’un sourire un rien crispé, elle témoigne :

    - Avec mon copain, on avait envie de le garder. Mais mon daron, il a laissé entendre que si ça m’arrivait, je pouvais prendre la porte…

    - Tu lui as dit, donc.

    - Non, non mais on a testé dans une discussion. Faut dire que ma sœur s’est retrouvée mère à 14 ans ½…

    - Et ta sœur, ça va. Elle a l’air heureuse.

    - Non, elle est seule et elle en prend plein la gueule de toute la famille…

    - C’est bien que ton copain ait pris position sur cette histoire de grossesse.

    - Ouais, grave.

    - Mais tu as l’exemple de ta sœur… C’est jeune 15 ans… T’as pas envie de finir ton CAP avant ?

    - Si, si, mais… Vous avez l’adresse du planning ?

    Franchement, elle n’arrivait pas trop à situer le nombre de semaines de grossesse, voir même à se situer tout court. C’est difficile à prendre ce type de décision quand on aime et qu’on a la vie devant soi. J’ai croisé les doigts pour qu’elle ne soit pas hors délai…

    Des infirmières, on aimerait qu’il y en ait deux par établissements. Et bien payées SVP, pour services rendus à la Nation. Il paraît que Roselyne Bachelot, ministre de la Santé, et Luc Chatel, ministre de l’Éducation, vont présenter le plan santé scolaire, lundi 15 novembre. Je ne sais pas pourquoi, mais je sens qu’on va avoir encore mal au cul…

     


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