• Depuis quelques jours, je me demandais comment la guerre au Proche-Orient allait s'inviter dans mes animations, au cœur de ces banlieues, qui prennent parfois, par mimétisme communautaire ou ennui pathologique, des faux airs de Cisjordanie.

    J'ai eu la réponse hier matin. Une cinquantaine de lycéens encapuchonnés tenaient le couloir menant aux toilettes aux cris de « Nous sommes tous des palestiniens ! Sauvons la Palestine ! A mort Israël !... »
    Autrement dit, interdiction pour les élèves israéliens (si tenté qu'il y en ait eu un jour dans ce lycée) d'aller chier un coup. Du coup, je me suis dit que ce blocus de l'anus était un prêté pour un rendu. À Gaza, les Israéliens empêchent les palestiniens de bouffer. Et bien ici, on empêcherait ceux qui soutiennent l'Etat hébreu, de chier. On frisait le dommage collarectal.

    J'ai demandé la permission d'une petite commission, et pour moi, le chek-point vers les urinoirs s'est ouvert facilement, sans palpage de bourses. Il est vrai que ma réputation de fournisseur officiel de capotes m'a beaucoup aidé. Le cessez-le-feu a aussitôt été proclamé et les soudards de fantasmer leurs futures parties de jambes en l'air... J'ai distribué à tour de bras des Mannix et du lubrifiant, tout en espérant qu'on éviterait la logique des conflits armés, où les soldats défoncés violent tout ce qui bouge sans l'ombre d'une protection... Ce couloir de fond de lycée menant aux toilettes prenait d'un coup des airs de corridor humanitaire, et moi d'un French Doctor ayant troqué ses sacs de riz pour des réservoirs à foutre...

    Cette aventure au cœur d'une poche de résistance palestinienne du Val d'Oise m'a ramené quelques années en arrière et m'a fait penser à un de mes anciens collègues. Je tiens ici à lui rendre hommage.
    Yakov (c'était son prénom), était Juif Israélien (je rappelle qu'on peut être musulman et Israélien). Pendant la première Intifada, alors qu'il était en train de faire son service militaire obligatoire, il avait refusé de casser les mains des gamins qui jetaient des cailloux sur Tsahal et il avait peint son casque en blanc. Il a été incarcéré, a réussi à s'évader et a déserté... Il vivait en France, loin de sa famille, de son pays mais sans l'ombre d'un regret. J'ai toujours pensé qu'on devrait décorer les déserteurs. Surtout ceux qui quittent une terre sainte où des types avec des couettes se lamentent contre un mur pour gagner un pays où des monomaniaques en keffieh organisent le blocus des urinoirs...


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